Chaque jour, découvrez dans www.plongee-infos.com l’histoire d’une épave, coulée à la même date par le passé, quelque part près des côtes françaises ou ailleurs dans le monde, déjà explorée… ou pas ! Vous retrouverez ainsi quotidiennement un nouveau site, pour vous confectionner une collection passionnante pour vos futures plongées ou simplement pour explorer… l’Histoire!
Le Grafton était une goélette de 80 tonnes basée à Sydney, qui avait pour habitude de naviguer en Australie pendant les années 1860. Parti de Sydney le 12 novembre 1863 en direction de l’île Campbell à la recherche de nouvelles richesses à exploiter : métaux, viande de phoques, tout devait être étudié pour offrir la meilleure rentabilité à une future exploitation. Mais les résultats ne furent pas à la hauteur de leurs espoirs : pas de mine d’étain exploitable, des phoques, oui mais en quantité pas suffisamment importante pour organiser une campagne de chasse rentable…
Le Grafton fit alors route vers les îles Auckland, au sud de la Nouvelle Zélande. Il entra dans le détroit des îles Auckland (Motu Maha) au nord de l’île Adams le 31 décembre 1863 pour faire relâche et s’abriter du gros temps qui le malmenait depuis quelques jours. A l’ancre dans le fjord Nord de Carnley Harbour dans la principale île du groupe, le 3 janvier 1864, son ancre ne résista pas à la tempête et le mouillage dérapa au pire moment. Poussée par les vents violents, la goélette fut drossée contre les rochers de l’île Auckland, à quelque 465 km au Sud de la Nouvelle-Zélande. Cinq hommes réussissent à atteindre la terre ferme et à récupérer quelques objets et un canot. Ils savaient qu’ils ne pouvaient espérer de secours avant plusieurs mois. Dans cette perspective, ils construisirent une cabane capable de résister aux ouragans de la zone subantarctique et ils purent se nourrir de lions de mer et d’un peu de gibier d’eau. Ils rédigèrent un règlement, véritable constitution inscrite sur la Bible du capitaine du bateau, Thomas Musgrave.
Le Français François-Édouard Raynal, qui avait été chercheur d’or pendant onze ans en Australie, possédait une solide expérience de la survie. Il réussit à fabriquer du ciment avec des coquillages, du savon et même des bottes et des vêtements en tannant des peaux de phoque. On construisit même une forge équipée d’un soufflet, en peaux de phoque, pour transformer les pièces métalliques récupérées sur l’épave en divers outils. C’est au récit qu’il fit ultérieurement de cette aventure (Les Naufragés, ou Vingt mois sur un récif des îles Auckland) que l’on doit toutes ces précisions.
L’équipage a survécu ainsi comme des Robinson pendant 19 mois de plus sur cette île éloignée de tout. Il y avait le capitaine américain Thomas Musgrave, le marin norvégien de 28 ans Alexandre McLaren, le marin anglais George Harris (20 ans), le cuisinier portugais Henri Forgés (23 ans) et l’auteur du récit, François-Édouard Raynal, français, 33 ans au moment des faits. Cinq hommes, cinq nationalités différentes. L’essentiel de leur approvisionnement a été fourni par la colonie de lions de mer. Leur présence ou absence saisonnière décidait des périodes d’abondance ou de disette. Le récit se termine par quelques pages annexes d’une description des mœurs de ces animaux. Le menu des naufragés se complétait d’oiseaux, de moules et de quelques poissons. Peu d’espèces végétales des îles subantarctiques sont comestibles.
Un an après le naufrage, les cinq marins se rendirent à l’évidence : les secours ne viendront pas. Les cinq hommes étaient déterminés à faire un effort pour atteindre la terre dans un bateau qu’ils avaient construit à cet effet, en agrandissant le petit canot qui leur avait servi lors du sauvetage, pour le transformer en embarcation pontée, pourvue d’un mât et de voiles récupérées sur l’épave du Grafton.
La barque finalement terminée ne pouvait contenir que trois des cinq naufragés. Le 19 juillet 1865, le capitaine Musgrave, le Français Raynal (l’auteur du récit) et le marin McLaren quittèrent l’île à bord de cette embarcation qui devait plus ressembler au radeau de la Méduse qu’à un bateau capable de naviguer en pleine mer… La barque fuyait de toutes parts et le pompage incessant était nécessaire pour la maintenir à flot.
Pendant cinq jours et cinq nuits, ces hommes courageux luttèrent sans relâche contre les vents et les vagues, franchirent près de 500 km de mer et finalement le sixième jour (le 14 septembre 1865, 20 mois après le naufrage), la petite troupe atteignit Port Adventure, sur l’île Stewart au sud de la Nouvelle-Zélande. Deux jours plus tard, le capitaine Musgrave conduisit lui-même l’expédition de sauvetage de leurs deux camarades restés sur les lieux du naufrage, avec un petit voilier, Flying Scud car aucun bateau d’importance n’était alors disponible. Le voyage aller-retour dura tout de même sept semaines, là où le petit canot avait mis 5 jours pour faire le trajet…
Le plus incoyable dans cette histoire, c’est qu’au moment où les naufragés du Grafton survivaient sur l’île d’Auckland, d’autres Robinson s’y trouvaient également : les survivants du naufrage du SV Invercauld, survenu en mai 1864, soit 4 mois après le Grafton. Les deux groupes cohabitèrent sur cette île pendant près de 6 mois sans jamais se rencontrer !
Le trois mâts barque SV Invercauld avait fait la traversée d’Aberdeen en Ecosse à Melbourne en Australie, en 1863. Début 1864, il entama son voyage de retour, mais après son départ, il disparut et ne donna plus de nouvelles dans les ports où il était censé faire relâche. Le mystère dura jusqu’ à la fin de 1864 où un navire français en croisière au sud de la Nouvelle-Zélande a touché le groupe désolé des îles d’Auckland et y a trouvé, dans une existence particulièrement précaire, le capitaine Dalgardno, son compagnon Andrew Smith et un marin ordinaire, seuls survivants de l’équipage de 25 hommes du trois mâts.
Les naufragés de ces deux navires restèrent plusieurs mois de part et d’autre de l’île Aukland sans s’être jamais rencontrés, vu le relief accidenté. Mais le capitaine de l’Invercauld raconta après son sauvetage avoir aperçu une fois une fumée dans le lointain.
Les trois hommes de l’Invertauld furent récupérés à la fin 1864, après 6 mois de survie. Mais l’équipage du Grafton dont personne ne soupçonnait la présence, ne fut pas sauvé et resta là encore dix mois de plus avant de franchir le bras de mer jusqu’à l’île Stewart par leurs propres moyens.
Le récit de François-Édouard Raynal, Les Naufragés, ou Vingt mois sur un récif des îles Auckland, reçut en 1874 le prix Monthyon attribué par l’Académie Française. Il faut par la suite réédité à de nombreuses reprises, jusqu’à nos jours. Pour la petite histoire, c’est ce récit qui inspira Jules Vernes pour écrire son roman L’île mystérieuse…
Les toponymes de la baie Musgrave, du mont Raynal (644 m) et de la pointe Raynal au sud d’Epigwaitt sur les îles Auckland commémorent la vie des naufragés du Grafton.
Dans les collections du Museum of New Zealand à Wellington se trouvent des photographies et quelques restes de l’épave.
Divers objets de cette aventure ont été offerts par François-Edouard Raynal à la bibliothèque de Melbourne : une paire de bottes en peau de phoque, une aiguille à voile en os d’albatros, des soufflets de forge en peau de phoque. Certains se trouvent aujourd’hui dans la collection du muséum de Melbourne.
Une plaque commémorative est toujours apposée dans une rue du quartier Saint-Benoît à Moissac, en France, ville de naissance de François-Edouard Raynal, né le 8 juillet 1830, mousse sur un trois-mâts à 15 ans, embarqué à Bordeaux, régisseur de plantation à l’île Maurice à 19 ans, chercheur d’or en Australie à 22 ans ; navigua pendant vingt-trois ans sur les mers australes, puis, de retour en France, devint fonctionnaire et… écrivain. Il finit sa vie d’aventures à Valence d’Agen où il s’est éteint le 28 avril 1898.
très belles histoires ..j aimerai partager avec vous d autre histoires d épaves , par exemple la découverte du voilier tamaya saint pierre de la martinique ,le trois mats windjammer de bonaire et quelques autres épaves des caraibes que j ai explore dans la serie televisee dreamwrecks avec mon amie catherine salisbury
bonne année
dominique serafini